samedi 19 avril 2008, 18h30, entrée libre - Eglise du Val-de-Grâce

En ce mois des 80 ans de la naissance de François Vercken, disparu en décembre 2005, deux œuvres du compositeur ont été données au cours du concert qui a rassemblé des pages du XVIIe siècle à nos jours.
L'Ensemble vocal "La Chapelle-Musique du Val-de-Grâce", dirigé par Etienne Ferchaud et accompagné à l'orgue par Hervé Désarbre, a chanté "Le Messie, vainqueur, roi et prêtre", sur des paroles de Didier Rimaud.

Maire-Claire Leblanc, soprano, et Patrick Ruby, guitare, ont donné les "Chants de nuit".

Autres compositeurs : Lebègue, Moulinié, Charpenttier, Lully, McLachlan...

vient de paraître
un coffret de disques De Plein Vent...

détails

Entretien accordé aux Editions du Chant du Monde

En mars 2005, au cours d’une des nombreuses visites amicales qu’il avait l’habitude de nous rendre aux bureaux des Éditions du Chant du Monde, François Vercken nous avait accordé une interview à l’occasion de la création de Dyptique, pour orchestre, sa dernière œuvre qui avait créée ce même mois par Yoël Levi et l'Orchestre National de France. A cette occasion, le compositeur avait résumé sa longue et riche carrière de musicien et d'homme de radio. Auparavant, il s’était entretenu avec Pierre-René Serna sur la genèse de Diptyque. Le musicologue a aimablement mis cet entretien à notre disposition.

Le Chant du Monde : François Vercken, votre biographie nous apprend que votre vocation de compositeur a été tardive, puisque votre premier opus officiel à été écrit à l'âge de vingt-sept ans. Etiez-vous alors totalement novice en matière musicale ?

François Vercken : Pas du tout. J'ai commencé ma carrière de chef de chœur à partir de quatorze ou quinze ans, âge auquel, tout en étant un parfait autodidacte, j'ai fondé ma propre formation. J'ai dirigé énormément, tout en composant pour mes chœurs successifs, toujours en autodidacte. A dix-sept ans, j'avais approché Honegger, voulant être compositeur. Cela n'a pas été un franc succès, car il m'a découragé, en m'avertissant que la composition ne nourrissait guère son homme ! Les encouragements sont venus d'ailleurs, le jour où, à Rabat, après un concert dans lequel j'avais programmé plusieurs petites choses, Yves Baudrier m'a exhorté à travailler plus sérieusement la composition. Grâce à lui, je suis allé chez Daniel-Lesur, à la Schola, pour étudier le contrepoint, puis chez Serge Nigg, pour l'harmonie et la composition. Mes obligations, familiales et professionnelles à la Radio me paraissaient insurmontables, au point d'abandonner la musique. Cela a été une époque difficile. J'avoue que j'ai été totalement découragé, et que j'ai failli tout lâcher! Je dois à l'attentive amitié de Maurice Ohana, qui m'a redonné la foi, de ne pas l'avoir fait. C'est à peu près à cette période que j'ai composé ce que je considère comme mon premier opus vraiment sérieux: Cantate pour un Vendredi Saint. A partir de là, les suggestions et commandes d'amis interprètes se sont finalement enchaînées jusqu'à maintenant, ce qui fait que le catalogue de mes travaux comporte environ une quarantaine de numéros

CDM : Vous avez fait une longue carrière à la Radio...

FV : Oui, tout cela a commencé quand Tolia Nikiprowetsky, qui était un excellent compositeur marseillais, a quitté Radio-Maroc pour seconder Pierre Schaeffer à Paris, alors responsable de l'OCORA (office de coopération radiophonique). Il m'a tout simplement proposé de le remplacer. Après cela, je suis allé à mon tour à Paris, chez Schaeffer notamment, dans son tout neuf "Service de la recherche". Pendant trois ans. J'ai dirigé ensuite le service artistique de Strasbourg, puis de Bordeaux. Je suis revenu à Paris comme conseiller de Michel Philippot, alors directeur de la musique à l'ORTF, pour devenir le numéro deux de France-Musique, sous Charles Chaynes. J'ai cumulé ensuite plusieurs fonctions : retransmission de concerts, responsable de la "musique de chambre", etc. J'ai animé un magazine hebdomadaire consacré à ma passion de toujours, la musique vocale collective, et notamment, à la musique chorale "amateur".

CDM : Beaucoup d'activités pour un seul homme... Comment avez-vous trouvé le temps de composer ?

FV : J'ai évidemment moins composé lorsque j'étais à la Radio. Et soit dit en passant, il va sans dire que je ne me suis jamais programmé. Mais j'ai quand même écrit régulièrement. Je continue aujourd'hui, comme beaucoup de confrères, à élaborer des œuvres créées, mais très rarement redonnées ensuite. Pour moi, 3 ou 4 "créations" par an... J'ai été aussi chroniqueur pendant dix ans au "Monde de la musique".


A propos de Dyptique

        "Diptyque" est le titre définitif, et originel à la fois, de mon œuvre. Elle devait s'inscrire dans la série "Figures de Méditerranée" [de Radio France]. D'où un autre titre précédent : Sinfonia concertante, qui correspondait à la thématique de la série. Mais ce titre, dont je n'étais pas entièrement satisfait, succédait lui-même à un autre, plus poétique : Et les citrons s'énamourèrent, d'après un vers d'Alcools, d'Apollinaire. J'aime beaucoup Apollinaire. Puis, le contexte ayant changé, j'ai repris mon surtitre, qui reflète mieux mes intentions. Diptyque est destiné à une formation Mozart. Ce qui peut surprendre pour l'Orchestre National. L'explication est simple. Je n'ai écrit jusqu'à présent que deux œuvres pour grand orchestre, qui ont été très bien reçues, mais qui n'ont jamais été redonnées. A cause de leur effectif. J'en ai tiré les leçons. Une formation réduite est mieux adaptée à la musique contemporaine, et laisse plus de chances de survie à mon ouvrage. C'est ce que j'ai pensé. Un peu à contrecoeur, je dois dire, car j'étais très tenté par une grosse machine. Les considérations pratiques l'ont donc emporté.
        Mon œuvre a été conçue comme un travail d'artisan. Je la considère virtuelle et c'est à l'auditeur d'en juger. Je ne crois pas aux gloses sur la musique. Je ne saurais dire si, au départ, je la portais en moi ; mais, peu après la commande, puis le travail auquel je me suis attelé, c'est finalement ainsi que je la considère. Je pensais depuis un certain temps à écrire pour orchestre, sans trop savoir pourquoi. Et j'avais noté nombre d'inspirations, que j'appelle mes petites briques, pour éventuellement bâtir ma maison, dont j'ai finalement profité. J'ai le souci de la forme et de la construction. Je commence toujours sur un plan très précis. Au fur et à mesure de l'avancée de mon travail, les idées s'accumulent. Je fais alors un nouveau plan, sélectionnant les inspirations que je juge adaptées. Après, vient l'écriture. D'autres idées s'ajoutent à ce moment pour venir étayer ma pensée.
        L'œuvre comporte deux mouvements. Ils ne sont pas spécifiés. J'ai abandonné les titres primitifs : Couleurs et Parfums. Mais ils donnent l'ambiance des parties de ce concertino pour orchestre.

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